lundi 19 décembre 2016

« Viens, et vois » (verset 6:7 de l’Apocalypse)

Découverte du film de Elem Klimov « Vas et Regarde » (1985), dont la lamentable adaptation du titre en français est « Requiem pour un massacre », qui donnerait à penser à un médiocre polar de série B française des années 60, alors que c’est un film magistral sur les actions et exactions des Einsatzgruppen sur le Front de L’Est en 1943… Les Einsatzgruppen étaient des formations SS chargées de l’extermination des Juifs, Partisans, Communistes, prisonniers de guerre, civils hostiles aux Allemands et qui agissaient conformément aux directives de « l’Ost Plan « sur la liquidation de la population Juive et Slave à l’Est. Ces Einsatzgruppen agissaient immédiatement sur les arrières de la progression de la Wehrmacht. La grande force de ce film, est de faire de nous des témoins, au travers le regard d’un jeune partisan de 15 ans, et cela sans aucune complaisance morbide dans la descriptions des massacres, et sans pathos non plus, juste un regard humain sur l’inhumain : la joie et le plaisir des unités SS à massacrer, (joie aussi des unités de la Wermarcht à assassiner les Juifs, lors par exemple du massacre de Berditchev relaté par V.Grossman dans ces carnets de guerre), leur impunité morale forgée par la « Weltanschauung » (la vision du monde) Nazi, qui s’exprime dans leur actes et leurs discours : c’est la première fois que j’entends dans un film un dialogue exprimant explicitement la volonté normale, légale, idéologique, d’extermination des Juifs et des Slaves pour le Lebensraum, l’espace vital, Nazi. Un film magistral à plusieurs points de vue sur la Guerre à l’Est - scénario, réalisation, photographie, interprétation, dialogues- , loin des Stalingrad d’Annaud et consorts et évidemment, et hélas, bien moins connus. Les Waffen SS, les troupes combattantes de la SS, est resté, par la réécriture Americano_Franco-Allemande de l’Histoire lors de la Guerre froide, dans le conscient collectif comme la seule expression du « mal » Nazi, forgeant un mythe simplificateur de l’idéologie Nazi par une dualité trompeuse : La Wehrmacht est représenté comme des preux guerriers, à l’esprit chevaleresque, aux officiers cultivés, aux hommes de troupes obéissants et valeureux, à l’opposé les Waffen SS sont des êtres malsains à la pathologie sadique et meurtrière, agissant dans la pulsion des combats. Mais cette histoire à l’eau de rose, servie à satiété par les états et les médias, se relève être mensongère. Sur le front de l’Est, où il y eut 15 millions de morts civils, donc 2, 5 millions de Juifs, la Wehrmacht a participé aux actions d’extermination de son propre chef : logistique pour le regroupement des population à exterminer par les Einsatzgruppen, exactions, pillage , extorsion de la nourriture, destruction des villages, prisonnier de guerre Soviétique condamnés sciemment à la famine. Cette dualité, « preux guerriers » vs guerriers « sans foi, ni loi », n’existe pas dans les faits, les soldats et officiers Allemands tous corps confondus, étaient unis par l’idéologie Nazi qui en faisait un groupe homogène, avec une pensée commune et unique, quant aux buts de la Guerre à l’Est : extermination humaine, économique, culturelle, militaire de l’URSS, pour constituer le Lebenraum Allemand, et une conscience partagée qu’ils faisaient le bien du Peuple Allemand en exterminant le Peuple Russe. La réecriture Americano_Franco-Allemand de l’Histoire a aussi réduit la SS à sa seule composante combattante, la Waffen SS, laissant de côté la partie civile et administrative de cette organisation. Mais la SS était l’infrastructure même de l’Etat Nazi, son Elite idéologique édificatrice du III ème Reich, qui a conceptualisé, théorisé, planifié, ordonné, organisé, appliqué, optimisé l’Ost Plan, la colonisation génocidaire de l’URSS. Richard Walther Darré était General SS et Ministre de l’Agriculture et à ce titre il a participé à l’élaboration de l’Ost Plan dans sa dimension de re-organisation agraire des territoires conquis, celle çi impliquait la disparition de 30 millions de personnes qui était planifié par une famine organisée. Konrad Meyer-Hetling, Herbert Backe, eux aussi était des hauts gradés de la SS et ont été au sein du Ministère de l’Agriculture des zélés technocrates de la colonisation génocidaire de l’URSS. Ici pas de SS psychopathes, abrutis, sadiques. Non ici que des intellectuels cultivés, des brillants universitaires, des diplômés en économie, en mathématique, en agronomie, en physique, en histoire, des dignitaires distingués aux belles manières. Méconnaître cela c’est méconnaître le Nazisme dans ces aspects fondamentaux. Après les procès de Nuremberg (procès dit des Ministères) on s’est empressé de reconstruire une Allemagne « propre », de gommer, de mettre sous silence, d’atténuer tout cela, comme si le 9 mai 1945, 20 ans idéologie Nazi s’effaçaient du jour au lendemain. La Pax America dans l’Europe de l’après guerre s’est faite au détriment des sacrifices humains et matériels des Russes (15 millions de mort civil, 11 millions de morts militaire), en faisant des vainqueurs du Nazisme, et pour lesquels nous étions redevable de notre liberté retrouvée, le nouvel ennemi.

samedi 26 novembre 2016

CINÉMA SOLA IMAGO




PRÉCEPTES

IMAGE
« Sola imago », par l’image seule, c’est un cinéma où le cadre, la lumière, font partie intégrante de la dramaturgie comme le jeu des acteurs, les dialogues, car l’image en mouvement est l’essence même du cinéma. 
Dans le cinéma narratif l’image n’est qu’utile, elle a perdu son sens propre, sa beauté, son émotion. Dans le cinéma « sola imago », l’image redevient le creuset du regard, c’est là que naissent les scènes. C’est un cinéma peinture, filmé à 24 coups de pinceau, en Noir et Blanc, car il permet de privilégier l’émotion, le ressenti, de souligner les lignes de force de l’image et de l’émotion.

SITUATION
C’est un cinéma résolument non narratif, qui ne raconte pas une histoire, qui n’est pas bâti sur une intrigue, mais explore une situation, un moment de vie. Comme l’étoffe des rêves, le film est composé d’un suite de tableaux, chacun venant se complémenter, offrant des espaces distincts de ressentis, de perceptions. La logique de l’enchainement de ces différents espaces, relève de celle des rêves, elle y est donc plus symbolique que raisonnée.

TEXTE
Les dialogues sont vus comme des « tableaux de mots », et non comme objet d’une continuité narrative, ou d’une interaction verbale entre personnages. Ils ne servent pas à expliquer mais à comprendre.
Les « dialogues » ne proposent pas une continuité narrative, ni un développement dramatique. Ils sont là, paroles que l’on écoute, sensation que l’on éprouve. Ils sont une étape, et non un lien narratif.
Aux dialogues, s’ajoutent les monologues, ce flot de paroles que l’on retrouve à la fois au théâtre et dans la folie. Par cette absence, celle de l’autre, le monologue permet de se concentrer sur un personnage, de l’écouter, de le voir. C’est aussi un moment où le comédien/ la comédienne, ne se retrouve pas seul(e) à l’image mais face à l’image. Exercice difficile : par sa présence, son jeu, son interprétation, il/elle devient le regard à lui/elle seul(e).

MUSIQUE
Dans le cinéma « sola imago », la musique est une forme de texte. Que l’on écoute. Que l’on voit. Elle n’accompagne, ni ne comble, ni n’efface l’image, elle est ; elle est comme le texte, elle façonne l’émotion, forge le ressenti. Elle possède sa propre intention qui vient compléter celle de l’image, en une union qui jamais n’altère l’autre. Elle n’est pas sur l’image, rajoutée, mais dans l’image, incrustée, faisant corps et âme avec elle, poésie sonore, qui vient en écho à celle de l’image.

IMAGE TEXTE SON
Ces 3 écritures travaillent de concert et en parallèle. Chacune a sa spécificité, mais au lieu de les développer séquentiellement elles le font en parallèle, le mixage jouant un rôle important dans ce rendu, ces 3 écritures venant alors se renforcer l’une à l’autre, dans un tumulte de sens.

INTIME ÉCOUTE INSTANT
C’est un cinéma intimiste, proche de la vie, filmé caméra à l’épaule en lumière naturelle avec une petite équipe. La prise de son est simplifiée par l’usage de micro cravate et un son d’ambiance perché, elle est time-codée avec la caméra. Le décor est naturel et peu altéré par les contraintes de mise en scène ou de cadre.
C’est aussi un cinéma d’écoute. Un plan non prévu sera tourné parce qu’aura éclos une nouvelle idée de mise en scène, un remaniement de dialogue, ou qu’une belle lumière se sera invitée sur le plateau. Cet aspect sera gardé au montage, où peuvent naître par le maniement plans, des séquences, jusqu’à là, encore inconnues.
Enfin, c’est un cinéma de l’instant. Sil y a un repérage, un découpage en scènes, la mise en image des plans se fait dans l’instant. Cette pratique apporte la souplesse nécessaire à la créativité, et si elle n’est pas sans risque, elle force à rester aux aguets de la beauté, et elle unit dans cet effort, l’ensemble des personnes qui contribuent à la création des plans.

vendredi 28 octobre 2016

Le chasseur de lumière

Avec mon Sigma SD Quattro a capteur Foveon, je suis devenu un chasseur de lumière. Plus dans le registre du chasseur de papillon que celui du tueur de grand fauve.  Avec ce filet à lumière, je capte avec délicatesse ombres, couleurs, pénombres, hautes  lumières, tout un dédale, un lacis de nuances, de subtilités, de dégradés.  Me rendant au Père Lachaise pour une courte promenade profitant d’un soleil d’hiver, à la lumière rasante et douce, après 5 jours passer à étalonner dans la quasi obscurité,  j’ai photographié les vitraux de certaines sépultures. 

Au retour épinglant mes prises sur mon écran, je fus de nouveau éblouis par le rendu que cet appareil me donne. J’avais ramené ces instants de lumière que des « passeurs de lumière » (1)  avaient créés. Ce qui éblouissait mon regard c’était la vérité éminemment subtiles, des couleurs, des dégradés, des ombres, des entre deux car le capteur spécifique du Sigma fournit  des couleurs qui ne sont ni calculées, ni  interpolées avec un rendu obligatoirement approximatif , comme avec une capteur à grille de Bayer, mais seulement captées. Simplement. Comme un peintre capte la couleur. La vie. 

Dans une société dominée par l’image, il est étrange que celles çi , depuis l’avènement du numérique, représentent le monde d’une manière, fausse, du moins faussée, car chaque image est un mensonge colorimétrqiue, une altération du regard que l’on porte sur ces instants. Comme vivre bien dans un Monde où sa représentation est mensonge et enlaidie ?
Les marketeurs nous abreuvent de réalité augmentée, mais nous vivons dans un monde à la réalité diminuée, où la simple réalité est atrophiée par sa technologie de représentation photographique et filmique.  Si la beauté du rendu du Sigma serait celle de la majorité des photographies prises, peut être que sa transmission de la beauté qui nous entoure, aurait une influence sur nos comportements…

Après ces quelques essais, j’aimerais  avec mon filet à lumière, partir à l’assaut des Cathédrales, ramener dans ma besace numérique, ces lumières de vitraux, ces éclats de lumière, d’âme.



1) Titre du livre de Bernard Tirtiaux

lundi 10 octobre 2016

Ce n'est pas un film


C’est une maison. C’est un film. C’est un film dans une maison. Une maison avec des miroirs. Et des couloirs. Un film avec des miroirs. Et des couloirs. Un jardin aussi. Avec un petit étang. Une lumière aussi. Douce, alanguie. Une lumière d’automne. Qui rentre par les fenêtres. Il y a deux femmes. Et deux enfants. Deux filles. Ce n’est pas un film. C’est une maison. Il est question de la violence d’une des filles à l’école. A mille lieux de la maison. Du jardin. Du bois des meubles. Du tissus des nappes. De la lumière des vitres. Il y a un homme qui arrive. Les personnages adultes passent dans les couloirs. Ce n’est pas un film. C’est un couloir. Un passage. Un fleuve qu’ils traversent. Un voyage intérieur. Il y a une voix à la radio. Elle parlent de deux jeunes tueurs encerclés par la police, non loin de la maison. Du film. Les dialogues sont des mots. Pas des paroles. Ce n’est pas un film. C’est des mots. C’est en noir et blanc. Les cadres sont beaux. La photographie est belle. Mélange de lumière et de flou. De peau aussi. De nervures de bois aussi. Ce n’est pas un film. C’est du noir et blanc. La musique. Oui la musique qui revient. Quelques notes de musique. Quelques notes de silence. Il y a un piano. Des mais d’enfants sur le clavier. Des mais d’enfants que des mains adultes guident sur les touches. Elles les guident avec force. Elles font mal. Violence de ces mains autoritaires sur ces mains d’enfants. Des visages qui regardent le jardin. A travers les vitres. La musique accompagne le regard. Ce n’est pas un film. C’est une musique. Des miroirs. Beaucoup de miroirs. Mais des miroirs doux. Ils reflètent que le temps qui passe. On y voit les visages, le corps des personnages. Mais le miroir ne les reflètent pas, il les montre. Ce n’est pas un film. C’est un miroir. Les deux jeunes tueurs encerclés par la police sont adolescents. Ils ne sont pas encore homme, mais ils ont déjà tués. Il y a un chat. Un chat noir. Il vit dans la maison. Dans le jardin aussi. Dans le couloir aussi. Il passe. Le suit. Déambule. Disparait au coin. L’homme parle. Il est grand. Il est fort. Mais c’est un enfant. Il joue l’homme, mais c’est un enfant. Les deux femmes l’écoutent. Elles regardent l’homme et écoutent l’enfant. Ce n’est pas un film. C’est un enfant. Une enfance. L’eau. L’eau de l’étang est un autre miroir. Un miroir vivant. Vaguelettes. Ondulations. Ridant le souvenir. Ce n’est pas un film, c’est un souvenir. La petit fille est recroquevillée sur le canapé. C’est la fin de la journée. La lumière est sur le départ. On distinct à peine son corps sur le divan. A coté des cousins, un corps. Son corps. Dans une pénombre de solitude. Cette petite fille s’appelle Nathalie Granger. C’est un film. De Marguerite Duras.
Nathalie Granger
Scénario et réalisation Marguerite Duras
Avec Lucia Bosé, Jeanne Moreau, Gérard Depardieu
Photographie : Ghislain Cloquet

La beauté retrouvée du photon



La photographie ou le film numérique est étrange. Le capteur qui équipe la plupart des appareils photos et caméra, ne sait pas enregistrer la couleur car il ne capte que l’intensité lumineuse (la « luminance ») ; pour  réaliser une image couleur, on superpose au capteur une grille dites de Bayer composées de filtre Rouge / Vert / Bleu.  Comme chaque pixel ne recevant  pas l’intégralité des composantes B/V/R, il va falloir interpréter mathématiquement « l’intensité » de la couleur de chaque pixel avec ceux adjacents pour déterminer sa couleur. La couleur n’est donc pas capturée mais calculée. Elle n’est pas réelle, mais construite sur des approximations. 

La réparation physique des filtres RVB de la grille Bayer sur le capteur fait que seulement 25% du rouge et du bleu  et 50 % du vert du sujet est utilisé pour déterminer la couleur « réelle » . Donc le rendu colorimétrique des belles images que nous voyons, n’est qu’une partie  de la réalité photographiée et sur laquelle on va appliquer des algorithmes d’interprétation pour calculer l’ensemble la couleur de l’ensemble des pixels. La couleur ainsi construite ne peut être celle réellement du sujet, c’est une approximation. 

Ce qui est extraordinaire c’est que c’est un formidable bond en arrière par rapport au film argentique, dont chaque partie élémentaire ( que l’on pourrait comparé à un pixel), recevait lui l’’ensemble des composants R/V/B de la couleur du sujet. De plus quelque soit la puissance des algorithmes mathématiques, sur des sujets possédant une même couleur mais avec des millions de nuances, de part la structure même de la grille de bayer il y aura une perte irrémédiable des nuances et détails.

Donc depuis des lustres les industriels de l’image numérique  nous fourguent une image dont les couleurs  sont une approximation de ce qu’elles sont  en réalité. Et par nos regards floués, nous croyons percevoir le monde.

Cette réalité construite à partir d’algorithmes mathématiques me troublait et le temps passant  le rendu colorimétrique de mes images m’attirait de moins en moins, et leur transformation en N&B me décevait…Par hasard sur le WEB, je suis tombé sur des images N&B étonnement belles, leurs nuances de lumière, leur dégradés étaient un festin pour le regard. Approfondissant ma recherche, je découvrais que ces photographies avaient été prise avec un appareil SIGMA équipé d’un capteur « Foveon » dont le fonctionnement est radicalement différent de celui des capteur à grille de bayer.  En effet, il utilise la propriété du silicium à absorber plus ou moins profondément le bleu, le vert, le rouge.
Alors, comme un film argentique, chaque pixel reçoit sa vraie quantité de R/V/B ce que implique que le rendu colorimétrie n’a pas à être interprété mathématiquement, car il représente la réalité de la lumière et la colorimétrie du sujet. La couleur est capturé pleinement, totalement, dans une sorte de fusion analogico-numérique. Les images sont somptueuses car elles ont les millions de nuances de la réalité,  cette richesse de nuances, donne un N&B fastueux avec une palette de noirs, de gris, de blancs très proche  de ce qu’un film argentique fournissait. Sans parler de la Balance des Blancs qui est d’une précision sidérante, car le blanc est capté et non calculé comme avec un capteur à grille de Bayer. 

A mes yeux, c’est une sorte de renaissance de la lumière photographique et étonnement c’est sa subtilité qui donne la force à l’image et ce rendu particulier n’est pas seulement beau, mais il est émouvant.

J’ai donc fais l’acquisition d’un SD Quattro avec un 30 mm ART. Les dimensions du boitiers contraste avec la petitesse du Sony A7 par exemple. Mais la main trouve sa place naturellement sans contorsion inutile  et maintient fermement le boitier. L’ergonomie des commandes est parfaitement pensé, et le bouton On/Off sur le fut du boitier m’a tout de suite séduit, car ayant manipulé souvent des Black Magic,  cet endroit m’a toujours paru parfait pour ce type de bouton ! 
L’ergonomie des menus et de l’écran complémentaire est là aussi étonnement bien pensé. Sur ces brochures et site web Sigma se dit être un artisan, confectionnant des instruments de photographie et non des boitiers et bien pour une fois, ces dires marketing sont vrais !  

On ressent dans l’usage que ce boitier a été pensé, réfléchi. Cela fait tellement du bien, de se retrouver avec un boitier que l’on aime, avec lequel on va faire corps. 
Evidement avec un tel boitier, fini la » photographie Lucky Luke » (la street photographie..)  où on sort son appareil plus vite que son ombre. Je l’ai pratiqué encore récemment, mais il me semble que  l’instant décisif cher à Henri Cartier Bresson, n’est pas dans la rapidité, mais dans la construction de son regard. 

Ce n’est pas l’instant décisif du sujet, mais celui du regard qui fait la photographie. Et celui là demande maturation, lenteur en quelque sorte. Il émane peu à peu de notre esprit, grandit, s’épanouit. Il faut du temps pour capter l’instant. Et puis, la beauté des images du Sigma et du 30 mm ART me donne envie que de ramener que celles la.



Nous sommes dans un monde où l’image numérique est reine et pourtant notre regard s’éloigne de la beauté par la confrontation quotidienne à la laideur du rendu colorimétrie  de la télévision, de youtube, du web, des appareils compacts, des smarphones et particulièrement dans ce dernier domaine, l’image  est sous la férule du marketing où le traitement logiciel semble être la pierre philosophale de l’imagerie numérique et qui nous impose une beauté qui n’est que marchande.


L’appareil photographique Sigma, redonne aux images  une émotion quelque peut émoussée par les  algorithmes, le marketing  l’industrialisation de l’image. Alors, la lumière, la couleurs redeviennent ce qu’elles ont toujours été des ondes aux formes douces vent s’échouer sur nos rétines, et la photographie une poésie visuelle.

dimanche 18 septembre 2016

Cette lumière




C’est cela l’écriture. Cette lumière. Cette lumière dans l’obscurité.  Celle du monde. Celle intérieure que nous portons en nous. Cette obscurité qui parfois nous submerge, nous envahit. Ce fragment lumineux qui fait que nous vivons. Cette lueur qui relie le passé au présent. Ces mille âmes, papillon de nuits anciennes, qui viennent en moi et qui à la lueur des mots se livrent à moi, dans leurs beautés et leurs horreurs. Ecrire. Comme dans le lointain passé, pour entretenir le foyer, porteur de chaleur et de lumière. Ecrire. Pour être un passeur, un simple passeur, un passeur  d’âmes. Etre un lien. Une union. Et par les mots et les images , tisser cette lumière qui apaisera nos peurs, soulagera nos douleurs et engendrera nos désirs. C’est cela l’écriture. Cette lumière.

dimanche 4 septembre 2016

Pas de Picasso pour Stalingrad



La ville de Guernica, durant la guerre civile Espagnole fut bombardé , par la Luftwaffe le 26 avril 1937. 50 tonnes de bombe y furent lâché et firent 3000 morts civils. Le Grand Pablo Picasso  peignit un célèbre tableau pour honorer ces morts et dénoncer cette violence. On connait peu ou pas le bombardement de Stalingrad du 23 Août 1942. Pour préparer l’offensive terrestre, la ville est bombardé par 600 avions, qui effectuent 1600  sorties et lâchent 1000  tonnes de bombes … Stalingrad est rasée, n’est que ruine, et 40.000 civils périrent, mais pas de Pablo Picasso, pas de chef d’oeuvre pour le souvenir de ces morts, juste un silence. Celui de l’oubli.

mercredi 31 août 2016

Stalingrad mon amour

























Depuis 1 an je m'intéresse à l'histoire du Front de l'Est durant la seconde guerre Mondiale, c'est à dire la guerre entre le Troisième Reich et  l'ex URSS, ayant quelques liens de parentés avec ce pays, mon arrière grand père, naturalisé Français en 1916, et mon grand père paternels étant nés à Nikolaïev, en Ukraine. Cette attrait pour cette période avait une facette  historique, comprendre les faits et  aussi une facette cinématographique, comment relater ces faits.

De part le système éducatif et médiatique (je me rappelle de la sacro sainte  journée spéciale « Jour J » le 6 juin sur Europe 1 dans les années 1970, et du visionnage familial tout aussi religieux du film « Le jour le plus long »), et mon absence de sens critique, la doxa était que  les Américains se soient sacrifiés (Omaha la sanglante) pour libérer l’Europe et que ce sont les Américains et leurs alliés qui ont vaincus Hitler.  La guerre à l'Est me semblait lointaine, presque secondaire. En fait, c'est juste le contraire. 

Ce sont les Russes qui ont vaincus Hitler, qui ont brisé les reins de la Wehrmacht,  fin 41 devant Moscou, début 1943 à Stalingrad,  juillet 1943 à Koursk. Le front de l’Est a été le principal front pour le Troisième Reich, 80% des pertes la Wehrmacht  fin 1944 était du au Front de l'Est. Et en terme de sacrifice les chiffres donnent le tournis : 
Pertes militaires  
URSS : 11 millions / USA sur les 2 fronts Europe et Pacifique :  420 000 (Europe : 183 000) 
Pertes civiles : URSS : 14 Millions / USA : Non significatif
Proportion morts des pertes civiles et militaires par rapport à la population de 1939 : URSS : 14 % / USA : 0,32% 

 C'est à Stalingrad que la Seconde Guerre Mondiale à basculé ;  le 2 février 1943 la VI Armée Allemande commandée par le Maréchal Paulus capitule et se rend à l’Armée Rouge. Encerclée par les Russes depuis le 19 novembre 1942, Goering pensait ravitailler les 320.000 hommes de cette Armée par un pont aérien, délivrant 500 tonnes par jour de nourriture, de carburant, de munitions. Mais Hitler et ses généraux étaient coupés de la réalité, cloîtrés dans leurs salles d’Etat-major et leur idéologie. 

Sur le terrain la réalité est tout autre: La défense antiaérienne Russe est efficace et nombreuse, l’aviation Russe de plus en plus hardie, le mauvais temps, le froid intense, le manque d’avion de transport de grande capacité réduit le tonnage apporté à 95 tonnes jour.  Et la 62 ème Armée Russe commandée par Vassili Tchouïkov qui ne cesse de mener une guérilla urbaine et livre le combat jour et nuit, bien que tenant plus que 10% de la ville, acculée à la rive occidentale de la Volga. Sur l’autre rive, l’Artillerie Russe pilonne sans cesse les positions Allemandes.

Alors, la VI Armée qui avait foncée durant l’été 1942 dans les steppes du Don, en une glorieuse, orgueilleuse et frénétique chevauchée mécanisée, meurt de faim, de froid, de maladie, d’épuisement physique et moral, autant que par les combats.

Le 2 février 1943, Stalingrad est silencieuse. Le Maréchal Paulus signe le capitulation Allemande. Les Nazis ont été vaincus.
Les Allemand ont perdus 180.000 hommes, auxquels il faut rajouter les pertes de leur alliés : Roumains : 35.000 ; Italiens : 27.000 ; Hongrois : 30.000. 

90.000  survivants sont fait prisonniers, dont 25 généraux,  seulement 6000 retrouveront l’Allemagne parfois plus de 10 ans après la fin de la Guerre.  

Les Russes ont 480.000 tués, 630.000 blessés. En 6 mois. Pour une bataille. A titre de comparaison, les Américains auront  pour toute la guerre et sur les deux fronts (Europe / Pacifique)  420.000 morts dont 183.000 en Europe. 40.000 civils sont morts à Stalingrad, Staline ne voulait pas évacuer la ville pour que les habitants puissent être incorporés aux combats et que les soldats ne se battent pas pour une ville vidée de ses habitants.

Si on continue de fêter, à juste titre, le 6 juin 1944, il faudrait tout autant,  fêter le 2 février 1943, pour rendre hommage et honneur aux combattants de l’Armée Rouge pour cette victoire qui influença d’une manière décisive le cours de Seconde Guerre Mondiale et notre présent destin collectif et individuel.

Il faudrait les honorer doublement car la guerre menée par les Nazis contre l'URSS n'est pas une "simple" guerre d'invasion et d'occupation comme celle menée en France, non c'est une guerre d'anéantissement, d’annihilation. d'extermination de l’URSS,  sur un plan militaire (anéantissement de l’Armée rouge), politique (destruction des institutions de L'Etat), humain (extermination de millions de civils  ) et économique ( pillages, mise en esclavage de la population pour servir  la, production Allemande, destruction des infrastructures non nécessaires au Reich).  Et tout cela a été minutieusement préparé, planifié, formulé dans  le « Schéma directeur pour l’Est » (Generalplan Ost) qui fut élaboré  dés 1939 par Hitler et la Haute Administration Nazi pour définir une « Nouvelle Europe ».  Du 22 juin 1941, début de l’invasion, jusqu’à décembre 1944, 14 millions de morts civils, dont 2,8 millions de Juifs, furent assassinés, il n’y a pas hélas d’autre mot, (massacres, famine organisée, bombardements) par la Wehrmacht et les Einsatzgruppen. 



On peut  dire que la guerre contre l’URSS est, au niveau de la Seconde Guerre Mondiale une guerre à elle seule tant elle diverge des autres théâtres d’opérations en terme  de but et d'échelle de pertes, de destruction, de crimes de guerre.

Ce n’est pas un discours pro modo pour l’URSS de Staline, je n’oublie pas la terreur qu’il instaura envers son propre peuple et sa culpabilité dans la mort de millions de morts de famine (Ukraine) ou au Goulag. Ni son machiavélisme en abrogeant la fonction des Commissaires Politiques durant  la bataille de Stalingrad, pour laisser faire les Militaires et la rétablir une fois la victoire acquise. Quelque jour après la Victoire, dans Stalingrad qui n’était que ruine et désolation, le NKVD installait déjà ses nouveaux bureaux. 


Il est donc indéniable, incontournable que ce sont les Russes qui ont vaincus les Nazis et donc libérés l’Europe ce sont eux les vrais vainqueurs en Europe,  même si l’aide matérielle Américaine à contribué à la victoire de l’URSS, qui a quand même transféré 1500 usines de la Russie de l’Ouest  en Oural et en Sibérie  avec la manière féroce de Staline. 

Ce sont les faits qui ont été effacés par le story tellling Franco Américain durant la Guerre Froide et l’Histoire a été re-écrite en faveur des Américains, cette falsification étant amplifiée et élevée en dogme par les médias  de tous bords. L’Ifop,qui fut créé en 1938, avait fait un sondage en mai 1945. A la question » Quelle est, selon vous, la nation qui a plus contribué à la défaite de l’Allemagne en 1945 ? » : 57 % indiquait l’URSS, 20% les USA, 12% le Royaume uni. En 1994 les opinions basculaient : 25% indiquaient l’URSS, 49% les USA, 16% le Royaume-Unis. Ceux de 2004 et de 2015 consolidaient cette tendance.

Ce savoir et cette perspective Historique, je l'ai acquis par la lecture, l'écrit, les mots. Peu par l’image étrangement pour un cinéaste. Les documentaires ne donnent qu'une vision étriquée, partielle de ce fut cette bataille. Excepté l’excellent documentaire « Stalingrad" de Pascale Lamche et Daniel Khamdamov, qui permet d'appréhender globalement  d'une manière didactique et avec recul cet événement dans ses différents aspects, les autres que j'ai vu, n'offrent qu'une vison parcellaire, toujours bâtie autour d'une quinzaine de témoignages enrobés d'images d’archives, parsemée  « d’anecdotes», où l’image (usage du lance flamme)  domine par rapport à la réflexions, où l’on passe de la force de l’image, à la farce de l’image  On apprend pas, on regarde.

Le pompon revient sans aucun doute à la série  « Apocalypse » de France 2 et l’épisode N°5  « l’Etau » qui couvre les années 1942/1943 et donc la bataille de Stalingrad . C’est l'Histoire à la sauce du « journal de 20H »,  l’Histoire de grande consommation, la culture d’Hypermarché avec un commentaire bâti sur des formules choc et creuses  (« l’enfer de Stalingrad »), des raccourcis historiques qui frisent l’approximation, une sous estimation flagrante ( consciente je pense) de la guerre en Russie pour une mise en avant des victoires Anglo Américaines (E Alamein, Afrique du Nord, débarquement de Sicile). De plus l’interprétation du commentaire par Mathieu Kassovitz renforce cet aspect marketing. Lui qui, à juste titre, enculait le cinema Français « pour ses films de merde « lors des Césars 2012, devrait aussi s'adonner à la sodomie sur ce type de produit auquel il participe. 

Pour les films traitant de Stalingrad, je n'ai vu que « Stalingrad » de Joseph Vilsmaier sorti en 1993,  je pense que c’est le moins pire des films ayant Stalingrad comme sujet. Il donne une perception de la désintégration physique, morale et  tactique de la Wehrmacht à Stalingrad. Dommage qu’à la fin du film, il n’est indiqué que les pertes Allemandes

Au vu du scénario des deux autres films sur Stalingrad je me suis abstenu de les regarder :
  • « Stalingrad, L'ennemi aux portes » sortie en 2001 de Jean-Jacques Annaud, (histoire d’amour sur fond de guerre urbaine agrémentée d’une lutte entre snipers Russes et Allemands ).
  • « Stalingrad » de Fiodor Bondartchouk ( histoire d’amour sur fond de guerre urbaine et de Maison Pavlov), film en 3D  IMAX sorti, en 2013. 

Mais le film de Joseph Vilsmaier reste dans le classique narratif en suivant le parcours de guerre d’un bataillon, et en chargeant les personnages de symbole qui ne font pas dans le subtil : Le général sadique, le capitaine bête de guerre, le jeune et beau lieutenant aux grand d’idéaux, les soldats camarades.  Des dialogue caricaturaux (un officier dit qu’il n’est pas nazi, son ami simple soldat lui répond que les officiers ont suivis Hitler), pour aborder des problématiques complexes et difficiles. Un tel dispositif dramatique dans un livre en ferait un roman de gare, mais pour un film cela est apprécié  et fait un succès au box office. Etonnant.

On y trouve aussi un élément récurrent du langage cinématographique du film de guerre/action, comme signature d’une belle image soignée : un plan séquence en un long travelling  dans un endroit remplis de mouvement de véhicules, d’hommes, et où les/le personnage central se fraye difficilement un chemin. Là aussi l’équivalent en écriture de cette facilité de mise scène,  serait conspuée, mais dans le film on trouve cette séquence « belle et impressionnante ».

Au niveau de l’écrit, l’incontournable Wikipedia offre une vision globale du Front de l’Est avec une série d’articles de grande qualité sur les batailles, mais aussi sur le ‘Generalplan Ost’, les crimes de guerres.

Les 600 pages du livre d’Antony Beevor, « Stalingrad »  donne de cette bataille une vision que l'image n'égale pas, ne peut égaler dans l'enchaînement,  la compréhension globale, la précision des descriptions sans pathos, ni recours à la personnalisation.

A l’inverse, » Stalingrad » de Theodor Liever « est construit sur la personnalisation complète (basée sur des récits de prisonniers Allemands) qui donne à ce livre des allures de roman. Mais à force de rentrer dans le détail, de donner à voir la particule élémentaire de la réalité des horreurs, il nous fait perdre la compréhension systémique de cette bataille,  et oblitère en fait  les conséquences de l’aveuglement idéologique d’Hitler et de ses généraux.

Le livre « Stalingrad » de Jean Lopez (éditions Economica) est remarquable à plus d’un titre. Il  croise d’une manière didactique plusieurs facettes militaire bien sûr, mais aussi économique et politique, offrant ainsi une rare vision d’ensemble de ce fut Stalingrad pour les deux belligérants. Qui plus est, en ayant peu  recours à des témoignages, c’est celui qui parle le mieux de l’extraordinaire défense des Russes durant les offensives Allemandes de mi septembre à mi novembre 1942. C’est le seul récit sur les trois qui m’a émut en retraçant par l’écriture simple, vive  et concise l’ enchaînement de ces différents combats et les sacrifices consentis par les Russes pour garder Stalingrad. 

Et puis  bien sûr « Les Carnets de Guerre » de Vassily Grossman, écrivain et journaliste, correspondant à Stalingrad pour le journal de l’Armée rouge «   Étoile rouge » de août 1942 à Janvier 1943. Remarquable témoignage, empreint d’une belle écriture, au plus près des soldats de l’Armée Rouge, de leur souffrances et de leurs espérances. De leurs âmes. Au plus prés aussi du Peuple Soviétique, des massacres des civils paysans et des  commissaires politiques et les massacres encore plus sauvages des Juifs d'Union Soviétique (dont sa mère à Kiev) dont il a consigné le témoignage des  survivants  dans "Le Livre Noir". Ce livre sera interdit après guerre en URSS, la politique officielle soviétique ne reconnaissant pas la spécifié du génocide des Juifs par rapport au reste du Peuple Soviétique, alors que  les Nazis eux l'avait théorisé et mis en œuvre en Europe...

 Est ce à dire que l'Image ne peut contribuer à l'Histoire ? Non, car il y a une autre approche, une approche basée sur l'émotion, le décalage, qui sans pouvoir se comparer à l'écrit, saura apporter une réflexion sur l'événement et c'est quand même cela la finalité il me semble. 

« Hiroshima mon amour », d'Alain Resnais sur un scénario de Marguerite Duras est je crois la juste démarche. Comme « Nuit et Brouillard », toujours d'Alain Resnais, sur les Camps de Concentration. Un films sur la guerre peut être autre chose que de montrer la guerre en fiction ou en archive, il peut aussi en parler, l'interroger. Nous interroger. 

L’abandon de l'aspect documentaire, des images d'archives, du schéma narratif basé sur le suivi d'un groupe de combattants,  d’une intrigue, permet d’accéder à un niveau de compréhension, de ressenti, de questionnent plus évolué. Plus intime. De construire, d’élaborer une pensée, un souvenir. De voir la guerre par l’âme. De forger une mémoire.


Alain Resnais s'est posé ces questions pour "Nuit et Brouillard", Marguerite Duras (et A.Resnais)  pour Hiroshima, en apportant comme réponse leur film. Je me pose ces questions au sujet de Stalingrad, et j'apporterai ma réponse sous forme d’image. Ça sera « VOSTOK » le second volet, après « NORD » de « La Tétralogie des Horizons ».

mardi 23 août 2016

Paris






Il est revenu. Le bruit. Le bruit de la ville. Ce moutonnement sonore. Cet indistinct entrant par les fenêtres ouvertes. L'écoute s'était habitué au silence d'août. A celui d'un Paris vidé de ses bruits. La ville alors, redevenait espace, lieux, endroits, cheminements. Arrêts. 
Le bruit est revenu. Les gens aussi. Il va falloir de nouveau partager Paris avec les autres. De nouveau s'astreindre à ne plus écouter, à seulement entendre. Paris va reprendre ses habits de bruit. Je l'aimais nu,  son silence à fleur de peau.


mardi 9 août 2016

Le parfait dans le Cinéma

Le premier plan de "Les diamants de la nuit «, du Cinéaste Tchèque Jan Nemec tourné en 1963, est un long travelling sur deux enfants qui ayant sauté d'un train de déportés, courent dans un pré, en légère pente, en bordure de la forêt pour s’y mettre à l’abri. Le travelling se poursuit sans discontinuité apparente dans la forēt. Mystère de la réalisation de ce plan, mi travelling, mi camera portée… Ce n'est pas les plan lisses au steadycam actuels, où tout est parfait, absolument parfait ; non la caméra a des mouvements organiques ; on perd le point sur le visage, on le retrouve ; les enfants courent, les Allemands leur tirent dessus, la caméra est au plus proche dès halètements, de ce désir de survivre, la camera passe des visages aux mains qui étreignent la terre dans un mouvement qui engendre le regard. 
Le plan n'est pas figé dans un carcan d'une image industrielle, mais il est dans le mouvement de l'image, de la vie. Le steadycam donne une image rigide, un mouvement froid, aseptisé, dépourvu d’aspérité. De réalité. La caméra est dissociée du corps, de l'esprit, c'est une image robotisée. Les plateaux de cinema ressemblent alors aux usines de construction d'automobiles où les robots sont omniprésents, où on n'y crée pas des images mais on les fabrique.
C'est un film "sola imago », par l'image seule, il n'y a quasiment pas de dialogue, pas d'histoire à proprement parlé, mais une situation et son déploiement, son développement dramaturgique. Et pourtant que d'émotion, de tension, d'implication. Une grande beauté émane de ce film. 
Et puis le merveilleux noir et blanc du film argentique des années 60. Et puis cette lumière. Cette lumière ; ce perpétuel clair obscur dans la forêt, avec ses trouées lumineuses, ses puits d'obscurité, ses rebonds de lumière, ses éclats d’ombre ; une lumière aux multiples aspérités, difformités, rugosités, plus matière qu’éther. Peut être est ce la perception Slave de l'espace, de la lumière ? Les Japonais aussi ont un rapport particulière à la lumière, à son absence. Le cinéma industriel, lui n'est pas dans la perception de la lumière, mais dans une volonté de la maîtriser totalement, une domestication si servile que le regard se meurt par cette lumière morte a force d’être parfaite.

vendredi 13 mai 2016

Sola imago (par l'image seule)


La forme narrative du cinéma est une sorte de dégénérescence de cet Art. Une forme maligne qui a presque complètement phagocyté les autres formes possibles. Pourtant le cinéma c’est avant tout, écrire avec des images. 
Raconter une histoire devrait être secondaire. Cette écriture visuelle a pour grammaire, les plans, les cadrages, les mouvements de caméra, la lumière, le montage, et ainsi constituer des phases visuelles exprimant sensations, sentiments, ressentis, sans l’aide désuète de la narration. 
Considérer la forme narrative comme seule forme d’expression du cinéma est aussi restrictif que de dire que le pinceau, en peinture, serait juste fait pour le portrait, et figuratif qui plus est. Non le pinceau, c’est Dali, Kandinsky, Monet, Cézanne, Picasso, Juan Gris, Bacon, Turner, Van Gogh, Jawlenshy, et bien autres…
125 ans après son invention, et malgré la débauche technologique de ces dernières années, et l’ouverture cette semaine du Festival de Cannes  il est enivrant de savoir que le cinéma reste une expérience d’écriture et une aventure poétique à vivre, sola imago, par l'image seule.

samedi 27 février 2016

DRAME AUX GALLERIES NEW LOOK

Vu les progrès de Boston Dynamics dans la robotique (voir sur le web leur video montrant un Robot qui se relève après qu'on l'au fait tombé volontairement) peut être que dans 50 ans on lira cela :


L'indicible est arrivé ce samedi 27 février 2066, un robot de la Garde Automatisée (G.A) des Galeries New Look, Boulevard Haussman, a ouvert le feu sur les clients faisant 52 morts et prés de 84 blessés donc 22 sont en urgence ultra absolue, 10 en urgence quasiment absolue, 8 en urgence absolue relative et 5 en urgence relativement absolue. 

Selon les premiers indices de l'enquête, ce G.A serait passé en mode attaque suite à une mise à jour, aux premières heures du matin fatidique, de son système RobotOS de Microsoft Robotics Inc (NYSE : MIRO) : il aurait confondu la poignée de main d'un collègue Humain en geste agressif à son égard. 

Selon nos informations il se serait mis ensuite en mode survie défensive et retranché  au fond du magasin, entre le rayon bricolage et celui de la lingerie féminine. Le GIGH (Groupement d'Intervention de la Gendarmerie Humaine) est aussitôt intervenu, en coupant l’électricité et les transmissions sur l'ensemble du quartier afin de le déconnecter et de le sous alimenter.

 Le Robot s'apercevant qu'il ne pourrait pas se recharger s'était mis en mode veille, il a fallut attendre 72 heures, le temps que ses batteries se déchargent, pour en venir à bout, des négociations avec des psychologues spécialisés en commutation robot humain, n'ayant pas abouties. A la demande du Juge de la Brigade de Répression des Erreurs Logicielles (B.R.E.L), une autopsie de sa carte mère sera effectué dès demain matin, pour tenter d'identifier le parcours du bug dans les réseaux neuronaux de son I.A (intelligence Artificielle).

En début d'après midi dans un communiqué de presse, Microsoft Robotics Inc, s'excusait pour la gêne  occasionnée et annonçait une nouvelle mise à jour  qui corrigerait la précédente (la 123 eme depuis le début de l'année)  et qui sera elle même corrigée par la suivante, assurait il.

Bien qu'une cellule de soutient Psychologique aux Robots a été mise en place pour permettre aux collègues du G.A de surmonter ce traumatisme , le Syndicat des Robots et des Machines Associés (S.R.M.A) s'associait à la douleur des proches des tué(e)s et blessé(e)s et demandait que des cas isolés comme ce  G.A ne devait pas altérer la confiance des Humains  à leur égard, la grande majorité des Robots étant d'une perfection absolue. 

Enfin, en début de soirée, on apprenait que le sénateur suprême Nicolas Sarzyko déposera  dès demain matin un projet de loi  visant à déconnecter  les robots ayant eu plus de 3 erreurs de comportement envers les Humains, car selon lui " il était insupportable que des bugs de gauche altèrent l'intelligence artificielle de droite".




mercredi 17 février 2016

Ma mère est printemps






















En 4 mois ma mère a perdu 10 kg. Elle est toute ténue, tout chiffonnée, toute perdue dans le grand cocon de son lit. Enfermée dans sa démence vasculaire, elle n’est que logorrhée d'angoisse jaillissant de sa bouche, comme une bile de mots,  les yeux fermés, les sourcils froncés. En souffrance intérieure. Muette.

Quand je lui demande d'ouvrir les yeux, ou pour la faire boire, d’ouvrir sa bouche, elle obéit, mais ses mouvements ne sont pas progressifs, ni proportionnés à l’action à venir ; elle ouvre grand sa bouche, grand ses yeux, une réponse musculaire plus qu’une réponse de la pensée. Comme si cette dernière s'effaçait déjà d’elle.

Ses petites mains sont décharnées ; sur ces os elle n’a mit qu’un gant fin, frêle de  peau. Faible, elles arrivent à peine à tenir un verre, et leurs mouvements lents, comptés, ne se font que dans un périmètre restreint, autour de son corps. Bras repliés. Sur son ventre. Sa poitrine. Son visage . A tâtons. 
Ces mains presque transparentes, si fragiles, si légères, savent encore caresser, parfois. Une caresse qui se termine par la préhension d’un de mes doigts, comme le nouveau né a ce reflex archaïque pour s’accrocher à sa mère, avec une telle  force, une force violente, que l’on est étonné de la resentir, tant ce corps paraît faible, déjà loin.

Dans l’obscurité  de cette angoisse, dans ce labyrinthe de peurs qui surgissent hors d’elle, parfois, rarement, jaillissent en ce flot halluciné, des fulgurances de conscience (“je dis n’importe quoi hein ?” ; “couvre toi bien, il fait froid”) qui me laissent abasourdi, sans voix, aux bords des larmes. Tout près. Des fulgurances, comme ces giboulées au printemps, aussi violentes qu’inattendues. Aussi belles, par le déchirement du ciel en bleu gris, que brèves. Comme cette pluie qui nettoie les trottoirs à grand coups de gouttes, ces mots de vie effacent ma tristesse. Un instant.