jeudi 31 mai 2012

Cinéma instantané




















Dans son film "Sur la route", Walter Salles nous livre une adaptation ennuyeuse, scolaire, hollywoodienne du livre de Jack Kerouac. Comment peut on filmer l'intimité avec 200 personnes ? ( comme d'habitude j'ai regardé jusqu'à la fin le générique, ma manière à moi d'exprimer mon respect pour les sans grades qui font un film). Quelques (beaux) plans abstraits de routes, de paysages défilants, mais utilisés comme plan de coupe. Pourquoi ne pas avoir transposer en écriture cinématographique celle de Kerouac, sa prose instantanée ?  Difficile avec autant de monde de faire de la création, de se sentir près du texte, près des acteurs, près des paysages. Près de l’écriture.
On a le droit  à un découpage laborieux, un film lent, long. Sans idées. Kerouac a écrit le manuscrit de " Sur la route" sur un rouleau de 35 m de feuilles mises a bout, ne pourrait on pas imaginer un délirant plan séquence qui durerait tout le long du film, qui serait l'image de ce rouleau/route, structurée de scènes  en prose d'image instantanée tout en abstraction de sens, en dérive d'émotions, en instantanée de sentiments ?
Evidement on se heurterait au mur de l'intelligibilité standard, mais au lieu de comprendre sans émotion, ne vaut il pas mieux être ému sans compréhension ? Aller plus profond dans le cerveau, dépasser la compréhension par la logique pour la compréhension par le sens, l'émotion générée.
Peut être que pour adapter «Sur la route», il faut suivre les 30 principes de la prose moderne édictés par Kerouac. Car Walter Salles nous  montre qu'un film est  une écriture et non  une suite de plans plus ou moins bien joués, plus ou bien bien filmés, plus ou moins bien montés. Sur la route du cinéma poétique, l'horizon est encore loin.

dimanche 27 mai 2012

La Lumière est matière






















Ayant passė (enfin !) à Resolve, merveilleux logiciel, avec une "Color Sciençe " puissante  et belle, j'ai validé différents worflows : Red, Alexa Pro Ress Log C,  Canon Log C , Cinena DNG, Canon 5D Cinestyle.

Ces validations ayant été réalisées d'une manière rapprochée, j'ai pu réellement ressentir la matérialité de la lumière, tant les spectres de ces cameras avaient une réponse différente à une même modification. L'un résistait, l'autre s'étalait, un troisième se dispersait, chacun avait sa vie propre, aucun n'était similaire.

C'est cela connaitre sa camera, faire corps avec le sien à la prise de vue et à l'étalonnage faire corps avec sa lumière qu'elle a capté. Car la lumière doit se comprendre, se ressentir avant de se voir et de s'offrir, enfin, au sens.

Nuit et Brouillard





















Je traverse une phase (rare, belle et cruelle mais aussi jouissive) de réelle écriture automatique, où le conscient abjure sa résistante par fragment, par instant, par absence, à l'inconscient et les mots s'écrivent sans leur gangue d'intelligibilité, matière brut de sens, à la fois obscur et lumineux, lointain et proche, étrange et banal.

Lors d'une écriture, N&N (Nach und Nebel / Nuit et Brouillard) s'est inscrit à la place de N&B. N&N était le nom de la directive Allemande concernant le traitement des résistant(e)s en pays occupė, elle stipulait :

« A. Les prisonniers disparaîtront sans laisser de trace.
   B. Aucune information ne sera donnée sur leur lieu de détention ou sur leur sort.»

La disparition. L'effacement. La perte.  Comme si mon désir de noir et blanc était un appel du passė, une résurgence d'autres vies, où infiniment sensible, je le vivais comme l'écho de cette perte. Ou alors la disparition de la  couleur, dans la nuit et le brouillard du sens, comme seul possible d'une image porteuse de sensation.

dimanche 20 mai 2012

Le plaisir de l'absence




























Coup sur coup à  quelques semaines d'intervalle est apparu la camera S16 Ikonoskop  Panchromatic et le Leica M Monochrom, deux machines qui ne font exclusivement que du Noir & Blanc. Au delà de la problématique de prix (le Leica  est à 6800E !!! ), l'apport de la qualité d'un capteur N&B (abandon de la mosaïque de Bayer et du traitement associé) est indéniable et la tentation est grande d'utiliser ces appareils..... 

Si en argentique passer en N&B coutait le prix de la pellicule, en numérique, paradoxalement, pour l’instant il  faut changer d'appareil !  
On peut se laisser bercer par le rêve d'un boitier full frame avec un dos/capteur interchangeable....Le Ricoh GXR avec ces modules indépendants combinant capteur/objectif ou combinant capteur et une monture M,  pourrait proposer cela, par exemple le GXR Mount A12 en version Monochrome.
Revient en moi, le désir de retrouver la subtilité des lacis des gris, la profondeur des noirs, l'envolée douce des hautes lumières. Appréhender la joie de l'abandon de la couleur, jouir du plaisir de son absence. Le Noir & Blanc comme révélateur de sens, de  la perception pure, où la vérité se noie dans l'image.